En course à pied le nom du vainqueur d’une épreuve intéresse peu le coureur lambda et les primes réservées aux premiers le moindre de ses soucis. Sa seule interrogation serait éventuellement de connaître le temps du premier pour une comparaison avec sa propre performance et ainsi de savoir s’il s’agit d’un parcours rapide donc plat CQFD ! Nous savons tous que les premiers du marathon de Paris courent la distance aux alentours des 2 heures et 6 minutes soit exactement 20km/heure pour une nouvelle comparaison avec Monsieur Lambda, sans pour cela citer le nom du dernier vainqueur, moi-y compris ! Mais que peut bien gagner ce célèbre méconnu du grand public lors du marathon de Paris ? Allons-y parlons « sous » : 50000€ au vainqueur, le quinzième se contentera de 500 €, le seizième gagnant le droit de revenir l’an prochain. A l’étranger ? New-York : 150 000 dollar US $ au winner plus une voiture auxquels vous rajoutez un bonus pour le temps réalisé, par exemple un surplus de 50000 $ si la performance est en dessous de 2h8’. « Pas mal, cela commence à faire ! » me direz-vous. A faire quoi ? Une semaine de salaire d’un footeux international. Vous faîtes le marathon toutes les semaines vous ? Du simple argent de poche pour ces footballeurs au salaire mensuelle dépassant parfois le million d’euros , Messi, mais oui, Eto’o et tout ….. Je n’aime pas le foot pour son environnement et je me suis largement contenté des 10000 dollars $ gagnés en master (vétéran aux Etats-Unis) lors du marathon de Chicago il y a quelques années. Face à l’irréalité de ces chiffres, je pense aussi à ces haltérophiles soulevant des tonnes de fonte dans des salles poussiéreuses, au nageur alignant les longueurs entre des murs bétonnés remplis d’eau. La passion n’a pas de prix ! Je pense également à la trentaine d’euros mensuelle de l’ouvrier à Djakarta fabriquant nos fameuses chaussures de running.
« Ouais, mais moi je fais ça pour le plaisir ! » me disent certains d’entre vous … Mais moi aussi j’adore courir, ce n’est pas parce que l’on court vite avec les meilleurs que la notion de plaisir n’existe pas. La prime d’arrivée devient la récompense des efforts fournis par des entraînements souvent bi-quotidiens et ce durant des années. Je n’ai jamais considéré cela comme un job, bien que cela compensa financièrement le congé sabbatique pris auprès de mon employeur (nb : une banque, tiens donc !). Si parfois avoir entendu le mot « mercenaire » fut blessant, je reste fier cependant d’avoir vécu de mon sport, surtout le mien, la course à pied. Je me suis adapté à une économie de marché, su me vendre, être un leader et porter les bonnes chaussures … Les jambes ne suffisent pas pour faire carrière, il faut vivre, kenyan ou pas !
Nous sommes l’une des rares pratiques sportives où le coureur débutant peut côtoyer, toucher la star mondiale ou la vedette locale. Un sport où le petit gros aux tempes grisonnantes, dossard 2189 accroché sur un vieux maillot de foot vert « Manufrance » se glissera en première ligne, un sprint de 80 mètres pour un court instant de gloire, pour une photo éternelle. L’enfant réclamera sa médaille, le vétéran 2 sa coupe, le manager kenyan son chèque … et moi je cherche à me débarrasser de mon congélateur gagné il y a 30 ans lors d’un semi-marathon local. J’avais été obligé de retourner le chercher le lendemain de la course sur la galerie de ma R12. J’étais fier de l’offrir à ma jeune épouse, j’étais devenu un « pro » !